FORMATION PROFESSIONNELLE : L’ÉCHEC D’UN PILOTAGE CENTRALISÉ

FORMATION PROFESSIONNELLE : L’ÉCHEC D’UN PILOTAGE CENTRALISÉ

ILLUSTRATION IA

Le rapport de la Cour des comptes du 28 janvier 2025 dresse un constat sévère sur l’impact du Plan d’investissement dans les compétences (PIC), mettant en lumière les limites du pilotage centralisé des fonds alloués à la formation. Conçu comme un levier majeur de transformation du système de formation, ce plan s’est heurté à des problématiques territoriales et organisationnelles qui ont empêché son succès.

Une gestion étatique déconnectée des réalités locales

L’un des principaux enseignements de ce rapport est que la gestion centralisée des crédits de formation ne permet pas de répondre efficacement aux attentes et aux besoins des territoires. Les enjeux en matière de formation varient considérablement d’une région à l’autre en fonction du tissu économique local, des secteurs en tension et des spécificités des demandeurs d’emploi. Or, le PIC s’est cantonné à une logique descendante, sans réelle adaptation aux réalités locales. Cette approche uniformisée a conduit à une dispersion des financements et à une inefficacité notable dans l’atteinte des objectifs fixés.

Une allocation des fonds au profit de grandes structures peu connectées au monde de l’entreprise

Le rapport souligne également que les organismes bénéficiant des financements du PIC sont majoritairement de grandes structures associatives ou semi-publiques. Ces dernières, souvent éloignées des réalités du monde de l’entreprise, peinent à proposer des formations réellement adaptées aux besoins du marché du travail. La priorité a été donnée à des logiques administratives et budgétaires, plutôt qu’à une approche pragmatique centrée sur l’insertion durable des bénéficiaires dans l’emploi. Ainsi, au lieu de favoriser des solutions de formation innovantes et flexibles en lien avec les entreprises locales, les fonds ont été principalement absorbés par des dispositifs existants, reproduisant les mêmes schémas inefficaces.

Un impact limité sur l’accès à la formation des publics visés

Si le PIC avait pour ambition d’accompagner deux millions de jeunes et de demandeurs d’emploi peu qualifiés vers une montée en compétences, le bilan de sa mise en œuvre reste décevant. L’augmentation du nombre d’entrées en formation n’est pas directement imputable au PIC, mais plutôt à la mobilisation individuelle du Compte Personnel de Formation (CPF). De plus, le rapport souligne des disparités régionales et une hétérogénéité selon les catégories de formation. En particulier, la proportion des moins diplômés accédant à la formation reste stable, tandis que les demandeurs d’emploi de longue durée et les bénéficiaires du RSA n’ont vu qu’une progression marginale de leur accès à la formation, sans lien avéré avec le dispositif.

Une modernisation de l’accompagnement entravée par le manque de pilotage stratégique

Si le volume inédit des crédits mobilisés a permis une certaine modernisation des pratiques d’accompagnement, en mettant davantage l’accent sur la personnalisation des parcours, l’État s’est contenté d’un rôle de financeur passif. Il n’a pas su imposer une véritable stratégie nationale en lien avec les spécificités régionales. Ce manque de coordination a conduit à une fragmentation des actions et à une concurrence territoriale inefficace. Faute de moyens suffisants au sein des services déconcentrés, le pilotage de l’État est resté faible et n’a pas permis d’orienter les politiques de formation des régions vers des objectifs clairs et mesurables.

Vers une nouvelle approche de la formation ?

Le rapport de la Cour des comptes invite à repenser le modèle de gouvernance de la formation professionnelle. Plutôt qu’un pilotage centralisé, une approche plus décentralisée, reposant sur une collaboration étroite entre les acteurs économiques locaux et les organismes de formation, apparaît comme une nécessité. Il s’agit de sortir d’une logique purement administrative pour construire une véritable articulation entre formation et emploi, en intégrant pleinement les entreprises dans la définition des besoins en compétences.

SOURCE: RAPPORT COUR DES COMPTES DU 28 JANVIER 2025

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