EFFET REALLOCATIF DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE VERS LES METIERS EN TENSION: MYTHE OU REALITE?

EFFET REALLOCATIF DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE VERS LES METIERS EN TENSION: MYTHE OU REALITE?
ILLUSTRATION IA

Cette étude publiée par Kevin M. Frick, Yagan Hazard, Damien Mayaux, Thomas Zuber analyse l’impact de la formation professionnelle sur les transitions professionnelles des demandeurs d’emploi français. 

Les auteurs développent une nouvelle méthode pour mesurer la distance en compétences entre différents métiers, utilisant le traitement automatique du langage sur des offres d’emploi. 

Ils constatent que la formation encourage des transitions vers des métiers plus éloignés en termes de compétences, mais pas nécessairement vers des secteurs en forte tension. 

L'étude repose sur des données administratives françaises et souligne la nécessité d’un meilleur ciblage des formations pour optimiser leur effet ré-allocatif sur le marché du travail. 

Les résultats, bien que démontrant un effet positif de la formation sur le retour à l’emploi, sont à interpréter avec prudence en raison d’hypothèses d’indépendance conditionnelle.

Ce document de recherche examine l'impact de la formation professionnelle sur les transitions de carrière des demandeurs d'emploi en France, en se concentrant sur la manière dont la formation influence le retour à l'emploi et la réorientation vers des métiers en tension.

Méthodologie et données

  • Mesure de la distance inter-métiers : Les chercheurs ont développé une nouvelle mesure de la distance entre les métiers en utilisant un algorithme de traitement du langage naturel appliqué aux offres d'emploi publiées par Pôle emploi. Cet algorithme permet d'isoler les compétences spécifiques de chaque métier et de créer une cartographie des métiers en fonction de ces compétences. Cette méthode est considérée plus performante que les mesures traditionnelles basées sur le Répertoire Opérationnel des Métiers et des Emplois (ROME V3).
  • Données administratives : L'étude utilise les données du dispositif Formation, Chômage et Emploi (ForCE), qui suit les trajectoires des demandeurs d'emploi ayant suivi une formation professionnelle entre 2018 et 2020. L'analyse se concentre sur un sous-échantillon de demandeurs d'emploi ayant eu un emploi stable au cours de l'année précédente, ce qui permet de définir précisément la notion de transition professionnelle.
  • Échantillon : L'étude exclut les formations associées à un projet de recrutement préalable (POEI, POEC, AFPR), car celles-ci sont souvent liées à des métiers en tension. L'échantillon est composé de demandeurs d'emploi ayant eu un emploi stable dans les 12 mois précédents, une population plus jeune et mieux formée que l'ensemble des inscrits à Pôle emploi.

Résultats clés

  • Effet de la formation sur le retour à l'emploi : La formation professionnelle a un effet positif sur le retour à l'emploi des demandeurs d'emploi, cet effet se manifestant principalement par des transitions professionnelles vers des métiers plus éloignés en termes de compétences par rapport au dernier poste occupé.
  • Transitions professionnelles : Les demandeurs d'emploi formés effectuent des transitions professionnelles plus importantes en termes de changement de compétences que ceux qui ne suivent pas de formation. La formation réduit la probabilité de retour à l'emploi dans le métier d'origine, et augmente la probabilité de retour dans un métier éloigné en termes de compétences.
  • Redirection vers les métiers en tension : L'étude montre que, contrairement à ce qui est parfois attendu, l'effet de la formation sur le retour à l'emploi ne semble pas être principalement tiré par une réorientation vers des métiers en forte tension. Les transitions professionnelles permises par la formation ne sont pas systématiquement dirigées vers les métiers les plus demandés.
  • Ciblage de l'offre de formation : Les résultats suggèrent qu'un meilleur ciblage de l'offre de formation professionnelle vers les métiers en tension pourrait améliorer l'impact de la formation sur la réallocation de la main d'œuvre.

Conclusion La formation professionnelle joue un rôle crucial dans la réorientation des demandeurs d'emploi vers des métiers différents en termes de compétences, ce qui favorise leur retour à l'emploi. 

Cependant, l'étude souligne que la formation ne conduit pas nécessairement à une meilleure adéquation entre l'offre et la demande sur le marché du travail, en particulier en ce qui concerne les métiers en tension. 

Les auteurs suggèrent qu'un meilleur ciblage des formations professionnelles sur les métiers en tension pourrait améliorer l'efficacité de la formation en termes de réallocation de main d'œuvre. 

SOURCE:  BANQUE DE FRANCE, WORKING PAPER  Kevin M. Frick, Yagan Hazard, Damien Mayaux, Thomas Zuber


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